Lorsqu’un faisceau de lumière collimatée, comme un laser, frappe un milieu semitransparent, il peut être à la fois absorbé et diffusé. Cela signifie que la lumière incidente est convertie en énergie thermique et redirigée. Sous certaines hypothèses, ces phénomènes peuvent être modélisés en utilisant une approximation diffuse dans COMSOL Multiphysics®. Cette approche de modélisation a diverses applications, du chauffage laser de tissus biologiques au traitement de matériaux. Approfondissons la question !
Définir un milieu semitransparent
Un milieu semitransparent est un matériau au travers duquel un faisceau lumineux peut parcourir une distance non négligeable avant d’être éteint par une combinaison d’absorption et de diffusion. L’absorption est le mécanisme par lequel l’énergie lumineuse est convertie en énergie thermique, entraînant une montée en température. La diffusion est le mécanisme qui redirige la lumière dans d’autres directions. La diffusion de la lumière peut prendre différentes formes: à un extrême se trouvent la réflexion spéculaire et la réfraction qui interviennent sur les surfaces de miroirs et de diélectriques, tandis qu’à l’autre extrême il peut y avoir une diffusion quasi-isotrope, similaire à ce que l’on peut observer dans un milieu turbide comme une eau très boueuse, dans laquelle la turbidité est due à de petites particules de formes et orientations aléatoires en suspension.
Un faisceau de lumière collimaté arrivant sur un milieu semitransparent peut être sujet à de la diffusion isotrope, ce qui signifie que la lumière est redirigée dans toutes les directions de façon égale. Cette diffusion se produit partout sur la trajectoire du faisceau, et la lumière diffusée est elle-même directement re-diffusée, cette image montre donc une vue simplifiée du processus.
Il est à noter que dans le monde réel, la plupart des matériaux présentent un certain degré de diffusion anisotrope, la lumière est donc préférentiellement redirigée dans certaines directions. Cependant, dans certaines applications, la diffusion peut être considérée comme étant isotrope, et c’est le cas auquel nous allons nous intéresser ici. Nous allons considérer un faisceau de lumière collimatée, un faisceau laser, arrivant sur un matériau, dans lequel la variation d’intensité lumineuse est décrite par un coefficient de diffusion isotrope et un coefficient d’absorption isotrope.
Développer la méthode de modélisation
Pour comprendre l’approche de modélisation, nous allons dans un premier temps supposer que nous avons un matériau qui ne diffuse pas, mais qui absorbe seulement. Cette situation peut être modélisée avec l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant du module Heat Transfer, qui résout la loi de Beer–Lambert au sein du matériau. L’utilisation de cette interface suppose que sur la frontière illuminée, l’intensité du faisceau est connue. Autrement dit, si l’on considère un faisceau de lumière de puissance connue se propageant dans l’espace libre environnant, l’intensité spécifiée est basée sur la fraction de lumière qui se propage dans le matériau.
L’équation résolue par cette interface est:
où \mathbf{e}_i est le vecteur donnant la direction du faisceau et I_i est l’intensité lumineuse sous forme de puissance par unité de surface, mesurée dans le plan perpendiculaire à la trajectoire du faisceau. Il peut y avoir plusieurs faisceaux incidents distincts se chevauchant dans l’espace, et une équation, indexée par i, est résolue pour chacun d’entre eux. Le terme \kappa est le coefficient d’absorption, qui quantifie la façon dont ces faisceaux sont absorbés. L’énergie absorbée est la somme de tous les faisceaux incidents: Q_r = \kappa \sum_i I_i. L’hypothèse de cette interface est que toute l’énergie lumineuse absorbée est convertie en énergie thermique, mais il est possible de modifier facilement les réglages de l’interface pour tenir compte de la diffusion.
Un coefficient de diffusion non nul, \sigma_s, peut être ajouté au coefficient d’absorption utilisé dans l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant, on peut ainsi écrire \kappa_{tot} = \kappa + \sigma_s. L’énergie absorbée peut ainsi être décomposée en une partie absorbée, \kappa/\kappa_{tot}, et une partie diffusée, \sigma_s/\kappa_{tot} .
Nous devons désormais résoudre la propagation de cette part de lumière diffusée à travers le milieu, en gardant à l’esprit qu’elle sera à la fois absorbée et re-diffusée partout. C’est là que nous nous tournons vers l’interface Rayonnement en milieu absorbant et diffusant du module Heat Transfer, qui fournit l’approximation P1 résolvant l’équation suivante:
où G est l’intensité radiative de la lumière par stéradian, ce qui signifie qu’elle prend en compte le fait que la lumière va dans toutes les directions, pas seulement dans une direction. La conversion de l’énergie lumineuse en énergie thermique est quantifiée par le terme -\kappa G dans le second membre, qui entraîne une baisse de l’intensité radiative. Le terme source, Q, induit une augmentation volumétrique en intensité radiative, et, dans ce cas, provient de la part diffusée des pertes calculées par l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant; donc, Q = \frac{\sigma_s}{\kappa_{tot}}Q_r.
En parallèle de l’équation, nous avons également besoin d’un ensemble de conditions aux limites pour le matériau lorsque l’on résout la lumière diffusée. Le faisceau laser incident pouvant entrer dans le domaine, on peut raisonnablement supposer que la lumière diffusée peut également en sortir. La fonctionnalité Surface semitransparente est adaptée à cette situation, et nous permet de spécifier une émissivité, \epsilon, et une transmittivité diffuse, \tau_d. Ces deux quantités doivent être inférieures ou égales à 1 et définissent la réflectivité diffuse \rho_d = 1-\epsilon – \tau_d. La lumière diffuse incidente sur cette frontière peut ainsi la traverser en totalité si \tau_d = 1, et , si \tau_d < 1, la lumière sera en partie réfléchie de façon diffuse dans le domaine.
Détails de l’implémentation
Pour implémenter un tel modèle dans COMSOL Multiphysics®, nous utilisons une combinaison de l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant et de l’interface Rayonnement en milieu absorbant et diffusant. La première interface n’a besoin d’être résolue que dans une fraction du domaine autour de la trajectoire du faisceau incident. Dans l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant, le coefficient d’absorption doit être modifié de façon à inclure les coefficients de diffusion et d’absorption. Lorsque l’on évalue les résultats, il est donc important de considérer la fraction de chaleur absorbée et non la chaleur totale.
Prise en compte de l’absorption et de la diffusion de la lumière collimatée via le Coefficient d’absorption de l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant .
L’interface Rayonnement en milieu absorbant et diffusant nous permet 1) d’ajouter les coefficients d’absorption et de diffusion séparément et 2) d’ajouter un terme source en utilisant la fonctionnalité Source de rayonnement, qui fournit la partie diffusée de la chaleur absorbée à partir de l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant.
Couplage de la lumière diffusée de l’interface Faisceau radiatif en milieu absorbant vers l’interface Rayonnement en milieu absorbant et diffusant.
Lors de l’évaluation des résultats, il peut être particulièrement instructif d’évaluer l’intégrale des pertes thermiques du faisceau incident, les pertes thermiques de la lumière diffusée, et la fraction du faisceau incident et de la lumière diffusée qui quitte le domaine de modélisation. Les graphiques et le tableau ci-dessous montrent la distribution de ces pertes et les intégrales. La distribution des pertes peut par la suite être utilisée dans une analyse de transfert de chaleur pour calculer les variations de température.
Distribution des sources de chaleur provenant du faisceau incident, à gauche, et de la lumière diffusée, à droite. L’ensemble de ces sources contribue à une augmentation de la température.
Faisceau incident, puissance absorbée | 0.49 W |
Lumière diffusée, puissance absorbée | 0.35 W |
Lumière diffusée, puissance sortante | 0.14 W |
Faisceau incident, puissance sortante | 0.02 W |
Sum | 1.00 W |
Tableau des intégrales des chaleurs et des pertes de rayonnement. La somme de celles-ci devrait être égale à la puissance du faisceau incident.
Mises en garde et conclusion
Comme nous l’avons vu, vous pouvez assez aisément implémenter un modèle d’absorption et de diffusion de la lumière, mais il est important de noter que cette méthode a deux limites. Tout d’abord, aucune réflexion spéculaire ou réfraction de lumière dans le matériau, due à un miroir ou à une lentille par exemple, ne peut être prise en compte, on ne peut donc modéliser qu’une partie d’un matériau raisonnablement homogène. Ensuite, la diffusion dans le milieu est supposée isotrope. Ces limites sont contrebalancées par la simplicité avantageuse du calcul: résoudre deux ensembles d’équations scalaires pour les intensités lumineuses collimatée et diffusée représente un très faible coût de calcul. De plus, les termes sources peuvent être facilement combinés avec une analyse thermique pour calculer l’augmentation de la température. Ainsi, si vous modélisez l’interaction d’une lumière laser avec un échantillon raisonnablement homogène d’un matériau semitransparent et que vous pouvez estimer que la diffusion est isotrope, cette approche est attrayante du fait de son efficacité.
Prochaine étape
Testez le modèle présenté dans cet article de blog en cliquant sur le bouton ci-dessous, qui vous mènera à la Bibliothèque d’applications:
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