Conversion thermochimique de la biomasse par la pyrolyse du bois

7 mai 2024

Le procédé thermochimique de pyrolyse, dans lequel les matériaux sont décomposés à de hautes températures dans une atmosphère inerte, convertit la biomasse en produits tels que le charbon solide, qui peut ensuite être raffiné en hydrogène par gazéification. Dans cet article de blog, nous explorons un modèle de pyrolyse appliqué à une particule de bois et regardons comment l’estimation de paramètres permet d’optimiser ce procédé.

Histoire et usages de la pyrolyse

Jadis, la pyrolyse était généralement menée en plaçant du bois dans une fosse couverte d’un matériau tel que la terre pour empêcher l’air d’y entrer. Cette méthode permettait au bois de se consumer sans entrer en combustion. Au cours du procédé, des vapeurs étaient libérées du bois, qui se condensaient ensuite en goudron. Cette forme de pyrolyse était souvent utilisée pour produire du goudron et du charbon, le goudron étant utilisé pour imprégner le bois des navires et le charbon étant utilisé dans le procédé de fonte de l’acier.

Un monticule de terre utilisé pour la production de charbon au Maroc.
Production de charbon utilisant la méthode de pyrolyse en fosse. Cette image est sous licence CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons.

De nos jours, des réacteurs en acier sont utilisés pour créer une atmosphère inerte, et la pyrolyse est utilisée dans l’industrie chimique pour produire des formes carbonées et d’autres produits chimiques à partir du pétrole, du charbon et du bois.

La pyrolyse est en outre la première étape dans la gazéification, un procédé qui par la suite convertit la biomasse en hydrogène en faisant réagir la biomasse avec des composants tels que de la vapeur à haute température. L’une des problématiques techniques soulevées lors de la gazéification de la biomasse est liée au fait que le goudron produit se condense au sein de l’équipement et crée un colmatage. En utilisant la pyrolyse comme prétraitement, la biomasse peut être convertie en un char de haute densité énergétique qui produit moins de goudron lors de la gazéification, facile à broyer et peu coûteux à transporter. On peut également produire de l’hydrogène par pyrolyse en utilisant la pyrolyse du méthane, dans laquelle le méthane se décompose en carbone et en hydrogène.

En utilisant la modélisation et la simulation, les ingénieurs chimistes peuvent optimiser les procédés de pyrolyse en prédisant leurs rendements chimiques en fonction des conditions dans lesquelles s’effectue le procédé de pyrolyse. Les données d’entrée du modèle nécessaires pour ce type de simulations peuvent être obtenues par estimation de paramètres à partir de données expérimentales. Nous allons découvrir un modèle de ce type à travers un exemple…

Modéliser la pyrolyse

Le modèle Parameter Estimation for Pyrolysis of Wood peut être construit en utilisant le module Chemical Reaction Engineering, un produit complémentaire du logiciel COMSOL Multiphysics®. Ce modèle inclut de l’estimation de paramètres, une fonctionnalité permettant de définir des objectifs multiples à partir de données expérimentales, ainsi qu’une variété de solveurs — toutes ces fonctionnalités ayant été introduites dans la version 6.2 du module Chemical Reaction Engineering.

Un modèle de particule sphérique de bois.
La biomasse modélisée est une particule de bois sphérique de taille centimétrique avec des propriétés de transfert de chaleur et de masse anisotropes.

Implémenter le modèle multiphysique

Le modèle est divisé en deux parties: la première montre comment mettre en place un modèle décrivant le procédé de pyrolyse, le transfert de la quantité de mouvement et la chaleur au sein de la sphère de bois anisotrope, tandis que la seconde partie présente comment utiliser l’estimation de paramètres pour optimiser le modèle. Les paramètres estimés sont une constante d’Arrhenius, deux chaleurs de réaction, et un coefficient de transfert de chaleur externe.

Les produits de la pyrolyse dépendent de nombreuses variables, telles que le type de matière première, la vitesse de chauffe et la durée du procédé. Du fait de la complexité du mécanisme de la réaction, des modèles réduits de réaction sont souvent utilisés. Les produits de la réaction sont regroupés selon leur phase. Les pseudoespèces résultantes sont ensuite utilisées pour mettre en place un schéma de réaction simplifié, pouvant être utilisé à des fins d’ingénierie.

Un schéma du schéma de réaction montrant les réactions primaire et secondaire de pyrolyse.
Le schéma réactionnel utilisé dans ce modèle.

Le schéma réactionnel décrit les réactions primaire et secondaire de pyrolyse. La décomposition primaire convertit le bois en pseudoespèces gaz (espèces qui ne condensent pas à température ambiante), goudron (tous les volatils condensables), et un solide intermédiaire. Au cours de la décomposition secondaire, le goudron produit est décomposé en gaz ou char, et le solide intermédiaire est décomposé en char. Lorsque le gaz et le char sortent de la particule, cela induit une perte de masse pouvant être mesurée expérimentalement. Dans ce modèle de réaction, les réactions primaires sont toutes endothermiques, ce qui signifie qu’elles vont avoir besoin de chaleur, tandis que les réactions secondaires produisent de la chaleur, étant donné qu’elles sont exothermiques.

Utiliser l’estimation de paramètres pour optimiser le modèle

Les problèmes d’estimation de paramètres sont constitués de trois composantes: des données expérimentales, un modèle direct qui représente physiquement l’expérience, et un algorithme d’optimisation qui compare les deux et met à jour les paramètres du modèle pour minimiser la différence.

Le dispositif expérimental utilisé pour récupérer les mesures est constitué d’un four avec une atmosphère inerte obtenue en faisant circuler de l’azote dans l’enceinte du four. La température du four est maintenue constante. L’échantillon de bois est inséré dans le four chaud, et sa température et sa masse sont enregistrées tout au long du procédé de pyrolyse. Le gradient de température est mesuré en trois positions au sein de l’échantillon: à la surface, à une position médiane et à une position centrale le long des fibres de bois anisotropes, dans la direction horizontale.

Un schéma montrant le système expérimental, incluant la particule de bois dans le four isotherme.
Le système expérimental, incluant l’échantillon de bois dans le four isotherme.

Le modèle direct décrit les réactions de pyrolyse, le transfert de masse, l’écoulement et le transfert de chaleur de la particule de bois de taille centimétrique. Dans cet exemple, le transfert de chaleur et la perméabilité du solide sont tous deux anisotropes.

Optimiser le modèle

Sans optimisation, le modèle direct décrit assez bien la tendance de la température, mais la masse finale dans l’expérience n’est pas du tout captée. Après l’estimation de paramètres, le modèle optimisé capte le moment auquel le pic de température est atteint au centre de la particule, et la masse finale est prédite avec précision.

Gauche: Prédiction du modèle des températures à la surface et au milieu, avec une comparaison entre les résultats du modèle direct (résolu avec les valeurs initiales des paramètres estimés) et ceux du modèle optimisé avec les données expérimentales. Droite: Prédiction du modèle de la température au centre et de la masse normalisée, avec une comparaison entre les résultats du modèle direct (résolu avec les valeurs initiales des paramètres estimés) et ceux du modèle optimisé avec les données expérimentales.

Evaluer les résultats

Les images précédentes nous ont permis de voir l’évolution de la masse solide totale de la particule en fonction du temps. Ci-dessous, nous avons illustré l’évolution de chacune des espèces solides en temps et en espace. Au début du processus, il y a majoritairement du bois. Ce bois est converti en gaz et espèces solides intermédiaires (is) par des réactions de pyrolyse primaire. Plus tard dans le processus, les réactions de pyrolyse secondaire ont converti ces espèces, et la majeure partie de la particule est constituée de char.

Un graphique montrant que lorsque la particule est chauffée, le bois est converti en un solide intermédiaire et en char.
Densités normalisées du bois, du solide intermédiaire et du char à trois instants différents.

Jetons maintenant un oeil à la température, à la source de chaleur et à la source de masse associées au procédé. Durant la pyrolyse primaire, au début du processus, le bois est converti en un solide intermédiaire, en gaz et en goudron. Cela engendre une source de masse positive (du gaz est formé), et une source de chaleur négative, étant donné que les réactions de pyrolyse primaire sont endothermiques. Vers le milieu du processus, autour de 270 s, les procédés secondaires formant du char ont démarré, comme on peut le voir à travers la plus faible production de gaz et la source de chaleur plus haute. Enfin, à la fin du processus, seule la pyrolyse secondaire se produit, donnant lieu à un pic de température au centre de la particule en raison de la chaleur dégagée.

  • Source de chaleur, source de masse et température à 150 s.Source de chaleur, source de masse et température à 150 s.
  • Source de chaleur, source de masse et température à 270 s.Source de chaleur, source de masse et température à 270 s.
  • Source de chaleur, source de masse et température à 433 s.Source de chaleur, source de masse et température à 433 s.

Un graphique montrant la source totale de chaleur et le flux total de masse dans la particule.
Les deux réactions exothermiques de production de char donnent lieu à un front de source de chaleur se déplaçant vers le centre de la particule. Les flèches indiquent le flux de masse total, qui est le plus élevé le long de la direction des fibres.

Prochaine étape

Vous voulez tester le modèle vous-même? Le fichier MPH et les instructions pas à pas sont disponibles dans la Bibliothèque d’applications:

Pour aller plus loin


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