Photonique sur silicium : Conception et prototypage de guides d’ondes sur silicium

19 septembre 2017

En 1870, un public a assisté à la mise en place d’une scène avec deux seaux superposés. En raison d’un petit trou dans le seau supérieur, l’eau se déversait dans le seau inférieur, se courbant au passage. À la grande surprise du public, la lumière du soleil a suivi la courbure de l’eau – un phénomène appelé plus tard “réflexion totale interne”. L’artiste sur scène, John Tyndall, était l’un des nombreux scientifiques qui ont essayé de contrôler la forme d’énergie la plus visible : la lumière.

Entrez dans l’ère de la photonique

Pendant des décennies, les chercheurs ont essayé de trouver un moyen de contrôler la lumière et de l’utiliser pour la transmission et le traitement des informations, un domaine d’étude connu sous le nom de photonique. Jusqu’à ce jour, ce sont les électrons qui ont principalement pris cette responsabilité sur leurs épaules. Plus récemment, les scientifiques ont pu fabriquer de manière viable des dispositifs nanostructuré pour contrôler le flux de lumière, grâce au développement important de technologies telles que la photolithographie, l’épitaxie par faisceau moléculaire et le dépôt chimique en phase vapeur. Les paquets de lumière (photons) ont été placés en candidats potentiels pour assumer les responsabilités du maintien de la loi de Moore.

Les débuts des circuits photoniques intégrés

L’objectif des chercheurs qui étudient la photonique consiste à mettre au point un analogue d’une puce électronique intégrée capable d’exécuter tous les processus de calcul requis à l’aide de photons, tout en étant efficace à la fois en en espace et en temps. Les scientifiques ont appelé cette technologie les circuits photoniques intégrés (PIC), des dispositifs qui pourraient intégrer différents composants optiques sur un seul substrat. Cette puce devrait, en principe, être capable d’effectuer diverses opérations optiques, telles que la focalisation, la division, l’isolation, la polarisation, le couplage, la modulation et (éventuellement) la détection de la lumière.

Un schéma de circuit photonique intégré (échelle non respectée) montrant les différents composants optiques.

Schéma d’un circuit photonique intégré (échelle non respectée), montrant différents composants optiques. Pour plus d’informations, voir Ref. 1.

Dans cet article de blog, qui est le premier d’une nouvelle série sur la photonique sur silicium, nous abordons les guides d’ondes optiques. Plus tard dans la série de blogs, nous examinerons comment ces composants optiques sont devenus une partie inévitable des PIC.

Développement des composants optiques pour les PIC

Les différents composants optiques qui constituent un PIC entièrement fonctionnel est un sujet de recherche. Les scientifiques ont déterminé que la meilleure source de lumière est issue de lasers qui peuvent fournir une source de lumière à bande étroite aux composants intégrés de la puce. Comme c’est le cas pour les fibres optiques, ils peuvent transporter la lumière d’une extrémité à l’autre sur des milliers de kilomètres. Ensuite, il y a le composant le plus courant dans un PIC : le guide d’ondes optique. Ce guide d’ondes permet de relier différents composants sur le substrat.

Des coupleurs d’entrée ont été mis au point pour coupler efficacement la lumière provenant de lasers ou de fibres optiques au guide d’ondes optique placé sur le substrat, tandis que les coupleurs directionnels ont été créés pour contrôler le couplage de la lumière entre deux guides d’ondes optiques parallèles.

Le résonateur annulaire coupe-bande a été mis au point, qui remplit la même fonction qu’un filtre optique (c’est-à-dire qu’il ne permet la transmission que d’une bande de fréquence étroite) et peut également coupler deux guides d’ondes optiques dans des directions opposées.

 

Un exemple de résonateur optique annulaire coupe-bande

Prise en compte des effets non-linéaires

Certains scientifiques ont étudié les effets optiques non linéaires quelque peu négligés jusqu’alors pour concevoir des ondes à seconde harmonique et à troisième harmonique. Avec ces ondes, il serait possible d’effectuer des opérations entre deux faisceaux optiques, telles que le doublement de fréquence, la différence et le mélange.

Une autre invention est le modulateur optique. Ces composants peuvent modifier l’intensité lumineuse en fonction de la tension de polarisation continue appliquée en utilisant les effets électro-optiques non linéaires.

Cristaux photoniques: contrôler la lumière

Dans la nature, il a été observé qu’avec un arrangement périodique de matériaux d’indices de réfraction élevés et faibles en 1D, 2D et 3D, il était possible de réfléchir une certaine bande de fréquence tout en laissant passer une autre bande de fréquence. Ainsi, ces matériaux peuvent agir à la fois comme un filtre et un résonateur lorsqu’ils sont arrangés selon une certaine répartition périodique. Un arrangement périodique de différents matériaux diélectriques est connu sous le nom de cristal photonique.

La quête d’un matériau pour propager la lumière

Avec l’idée de créer des guides d’ondes optiques pour propager la lumière sur des boîtiers à l’échelle de la puce, les scientifiques se sont interrogés sur les matériaux à utiliser. L’un de ces matériaux était l’arsénure de gallium (GaAs) à haut indice de réfraction. Il a été utilisé comme coeur et a été entouré d’AlGaAs à faible indice de réfraction. Des techniques plus avancées ont été développées pour doper le titane dans le substrat de niobate de lithium afin d’augmenter son indice de réfraction en guise de cœur.

L’accent a été mis sur la silice, qui est plus facilement disponible que tout autre matériau. Cette technologie est connue sous le nom de silice sur silicium (Si-SiO2) ou silicium sur isolant (SOI), où le silicium (possédant un indice de réfraction élevé de ~3.5) est intégré dans la silice (indice de réfraction plus faible de ~1,4). Les techniques de fabrication du silicium sont bien établies (grâce aux puces électroniques) et, en même temps, le silicium est compatible avec d’autres techniques CMOS, ce qui a contribué à stimuler la recherche sur la technologie photonique sur silicium.

Différentes configurations de guides d’ondes sur silicium

Le point crucial du guide d’ondes sur silicium réside dans le contraste élevé de son indice de réfraction, avec une différence d’environ 50%. Les travaux antérieurs reposaient sur la réflexion totale interne pour confiner l’énergie. Dans ce cas, l’énergie était confinée dans un coeur d’indice de réfraction élevé entouré d’une gaine d’indice de réfraction faible. Cependant, les travaux récents ont confiné l’énergie dans la fente à faible indice de réfraction voisine des dalles à indice de réfraction élevé, ce qui contribue intrinsèquement à réduire les pertes.

Guider la lumière dans un indice de réfraction élevé

La première technique consistait à confiner l’énergie dans un milieu à indice de réfraction plus élevé, où le cœur interne (de l’ordre de quelques centaines de nanomètres) est constitué d’un matériau à indice de réfraction élevé (silicium) entouré d’une gaine à faible indice de réfraction (silice). La différence d’indice de réfraction doit atteindre 50%.

Le mode fondamental est confiné dans le noyau, comme le montre l’image ci-dessous à gauche, et la puissance normalisée confinée, comme le montre l’image ci-dessous à droite.

Graphique du mode fondamental pour un matériau à indice de réfraction élevé à une longueur d'onde de fonctionnement spécifique.
Un graphique représentant la densité de puissance normalisée à travers le centre d'un guide d'ondes sur silicium.

Gauche : le mode fondamental pour une longueur d’onde de fonctionnement de 1.55 um. Les flèches blanches et noires représentent le champ magnétique et électrique. Droite : La densité de puissance normalisée à travers le centre du guide d’ondes.

Guider la lumière dans un indice de réfraction faible

Bien que contre-intuitive, l’énergie pourrait également être piégée par un indice de réfraction faible. Il a été constaté que davantage d’énergie reste piégée dans une région uniforme et étroite (20 à 80 nm), ce qui rend un faible indice de réfraction plus attractif pour l’intégration aux circuits photoniques.

Une telle conception implique deux éléments à haut indice de réfraction voisins d’une nano-fente à faible indice de réfraction. Une énergie considérable est en outre limitée à la région de la fente.

A plot of the transverse field in a waveguide with a 50-nm slot.
A graph plotting the normalized transverse electric field through the center of a waveguide in COMSOL Multiphysics®.

Gauche: Le champ transversal (Ex) pour une largeur de fente de 50 nm. Droite : Le champ électrique transversal normalisé (Ex) à travers le centre du guide d’ondes.

Afin d’analyser la largeur requise de la nanofente pour délivrer une puissance maximale à travers le guide d’ondes, il est impératif d’effectuer un balayage de la largeur, comme indiqué ci-dessous.

Un graphique comparant la puissance et l'intensité normalisées dans la fente et la largeur de la fente.

La puissance et l’intensité normalisées dans la fente en fonction de la largeur de la fente.

Conception et prototypage de guides d’ondes sur silicium

Une quantité importante de ressources sont nécessaires à la fabrication et l’analyse d’un tel prototype de guide d’ondes optique. Une autre approche, préférable, consiste à utiliser des outils numériques tels que le logiciel COMSOL Multiphysics®. Grâce à cet outil de simulation, il est possible de créer rapidement des prototypes et d’approfondir la compréhension du systèle avant de finaliser le prototype à fabriquer.

Nous pouvons utiliser COMSOL Multiphysics® pour effectuer une analyse de mode sur la section transversale 2D du guide d’ondes en silicium (à la fois pour les cas d’indice de réfraction élevé et faible). Cela nous permet d’évaluer l’indice de réfraction effectif du guide d’ondes, ainsi que le mode fondamental, ce qui nous aide à comprendre la distribution de puissance normalisée.

Nous implémentons la propagation 3D complète pour les deux types de guides d’ondes en ayant d’abord une géométrie 3D du guide d’ondes optique et en attribuant des conditions aux limites de Port Numérique aux deux extrémités du guide d’ondes. L’Analyse de Mode sur Frontière (similaire à une analyse de mode en 2D) pourrait être appliquée sur ces ports numériques pour déterminer leur mode fondamental. Le mode fondamental serait utilisé pour décrire la propagation interne au guide d’ondes en utilisant une étude Domaine Fréquentiel comme le montrent les animations ci-dessous.

 

La composante y du champ H se propageant dans le cas d’un confinement à indice de réfraction élevé pour un guide d’ondes sur silicium d’une longueur de 10 um.

 

La composante y du champ E se propageant dans le cas d’un confinement à indice de réfraction faible pour un guide d’ondes sur silicium d’une longueur de 10 um.

Dernières réflexions sur les guides d’ondes sur silicium

Il s’agit du premier article de la série de blogs sur la photonique sur silicium, où nous aborderons en détail différents composants optiques et la manière dont un outil d’analyse par éléments finis tel que COMSOL Multiphysics® peut aider à concevoir ces composants. Au cours de notre voyage allant des cavités laser aux photodétecteurs nous allons rencontrer des scientifiques fascinants et discuter de la façon dont ils ont tenté de maîtriser la lumière.

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Références

  1. B.E.A. Saleh and M.C. Teich, Fundamentals of Photonics.
  2. K. Yamada, “Silicon Photonic Wire Waveguides: Fundamentals and Applications”, in Silicon Photonics II, 2011.
  3. V. Almeida, Q. Xu, C. Barrios, and M. Lipson, “Guiding and confining light in void nanostructure”, Optics Letters, vol. 29, pp. 1209–1211, 2004.

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