Comment accélérer la modélisation des dispositifs de type filtre passe-bande

18 juillet 2024

Lorsque l’on conçoit des dispositifs RF de type filtre passe-bande haute qualité à l’aide de la méthode des éléments finis dans le domaine fréquentiel, on a bien souvent besoin de recourir à de nombreux échantillonnages de fréquence pour décrire plus précisément la bande passante. Le temps de simulation d’un dispositif micro-ondes est directement proportionnel au nombre de fréquences à résoudre, et augmente donc avec la finesse de la résolution fréquentielle. Deux méthodes de simulation puissantes permettent d’accélérer la modélisation de tels dispositifs, elles sont proposées dans le module RF, un add-on au logiciel COMSOL Multiphysics®.

Note de l’éditeur : cet article de blog a été publié le 4 juillet 2016. Il a depuis été mis à jour pour refléter les fonctionnalités actuelles et le rendu des résultats.

Brève introduction aux deux méthodes de simulation RF

Les deux méthodes de simulation que nous allons aborder dans cet article de blog sont la méthode AWE (Asymptotic Waveform Evaluation) et l’analyse fréquentielle sur base modale (FDM). Ces deux méthodes sont là pour minimiser l’allongement du temps de calcul lors de l’utilisation d’une résolution fréquentielle très fine ou de l’exécution d’une simulation à bande ultra-large à l’aide d’une étude classique Domaine fréquentiel. La méthode AWE est assez efficace lorsqu’il s’agit de décrire des réponses en fréquence lisses ayant une ou aucune résonance. La méthode FDM, quant à elle, est utile pour analyser rapidement les filtres à plusieurs étages ou comportant un grand nombre d’éléments qui ont plusieurs résonances dans la bande passante ciblée. Les deux sections suivantes traitent de leurs réglages habituels et de cas d’utilisation.

Il est important de mentionner que les méthodes AWE et FDM sont toutes deux presque indépendantes du pas fréquentiel sélectionné. Il est ainsi possible de diminuer librement la valeur du pas fréquentiel afin d’obtenir un graphique bien résolu et ce, sans ralentissement notable du calcul ni utilisation supplémentaire de la mémoire. Il y a cependant un inconvénient : diminuer la valeur du pas fréquentiel peut affecter la quantité de données stockées dans la solution finale. Dans la suite de cet article de blog, vous trouverez dans la section consacrée à la gestion des données des recommandations permettant de réduire de manière significative la taille du fichier généré.

Il convient de noter qu’avant d’effectuer un calcul AWE ou FDM avec une résolution fine, il peut être utile d’effectuer une simulation préliminaire de Fréquence propre et de Domaine fréquentiel classique avec une résolution fréquentielle grossière. Ceci permettra d’obtenir une estimation rapide et pertinente des positions des résonances et une compréhension générale des tendances fréquentielles du système, y compris pour les bandes passantes réelles et la résolution fréquentielle souhaitée.

La méthode AWE favorise la modélisation d’ordre réduit

Pour notre propos, il serait trop technique de discuter des caractéristiques numériques et des algorithmes mathématiques de la méthode AWE — qui est une technique avancée de modélisation d’ordre réduit. Nous allons plutôt expliquer comment utiliser cette méthode avec le module RF. La version 6.2 de COMSOL Multiphysics propose une étape de calcul Balayage en fréquence adaptatif qui implémente la méthode AWE. Cette fonctionnalité nécessite de spécifier une plage de fréquence cible et de choisir une expression à utiliser pour l’estimation de l’erreur par l’algorithme AWE. Le solveur effectue un balayage adaptatif fréquentiel rapide et utilise, par défaut, des approximations de Padé.

L'interface utilisateur de COMSOL Multiphysics illustrant le Constructeur de modèles dans lequel l'étude Balayage en fréquence adaptatif est mise en évidence et la fenêtre de réglages correspondante dans laquelle les sections Réglages de l'étude et Sélection de la physique et des variables sont déployées.
Les réglages de l’étape de calcul Balayage en fréquence adaptatif montrant l’expression par défaut de la méthode Asymptotic Waveform Evaluation (AWE) utilisée.

La méthode AWE est très utile pour simuler des circuits résonnants, en particulier des dispositifs de type filtre passe-bande présentant de nombreuses fréquences de coupure. Par exemple, dans le tutoriel Evanescent Mode Cylindrical Cavity Filter, disponible dans la Bibliothèque d’applications, un balayage fréquentiel de 3,45 GHz à 3,61 GHz avec un pas fréquentiel de 5 MHz est initialement effectué à l’aide d’une étape de calcul Domaine fréquentiel classique.

Tutoriel de filtre à cavité cylindrique à mode évanescent (à gauche) et résultats du balayage fréquentiel discret (à droite). Le graphique de paramètres S ne semble pas lisse autour de la fréquence de résonance.

Supposons que vous souhaitiez relancer la simulation avec une résolution fréquentielle beaucoup plus fine, par exemple un pas de 100 kHz, qui est donc 50 fois plus petit. Vous pouvez vous attendre à ce que le temps de calcul soit multiplié par 50. Cependant, lorsque l’on utilise l’étude Balayage en fréquence adaptatif dans cet exemple précis de modèle, la durée de la simulation est presque la même qu’avec un balayage en fréquentiel classique, avec l’avantage de pouvoir obtenir toutes les solutions calculées pour la variable dépendante avec le pas de 100 kHz.

Le temps de simulation peut varier dans une certaine mesure en fonction des informations saisies par l’utilisateur dans les expressions AWE. Toute variable du modèle peut servir d’expression AWE, pour autant qu’elle génère un graphique lisse comme une impulsion gaussienne ou une courbe lisse en fonction de la fréquence, mais le choix évident et typique est une expression globale basée sur les paramètres S. Par exemple, la valeur absolue de S21 (abs(comp1.emw.S21)) fonctionne très bien comme entrée pour l’expression AWE dans le cas d’un filtre passe-bande à deux ports. Notez que si la réponse fréquentielle de l’expression AWE contient un gradient infini — ce qui est le cas pour la valeur du S11 d’une antenne avec une excellente adaptation d’impédance à une unique fréquence de coupure — la simulation prendra plus de temps à être réalisée. Si les pertes de l’antenne sont négligeables, une expression alternative telle que sqrt(1-abs(comp1.emw.S11)^2) peut être plus efficace et réduire le temps de calcul. Les expressions mentionnées ci-dessus sont les choix par défaut Contrôlés par la physique pour l’expression de la méthode Asymptotic Waveform Evaluation (AWE). À titre de vérification, il est toujours possible d’effectuer un balayage préliminaire en Domaine fréquentiel avec une résolution grossière et de tracer les expressions pour choisir celle qui est la plus lisse.

Lorsque vous êtes prêt à exécuter le Balayage en fréquence adaptatif, n’oubliez pas de renseigner le pas le plus fin souhaité dans les réglages de l’étude. Une fois la simulation terminée, vous remarquerez que le temps de simulation est presque identique à celui du balayage discret. Comparons maintenant les paramètres S calculés. Comme le solveur AWE a effectué un balayage de fréquence 50 fois plus fin, le graphique de sa réponse fréquentielle (paramètres S) est beaucoup plus satisfaisant. Cette approche permet non seulement de gagner un temps précieux, mais comme l’illustre le graphique ci-dessous, elle permet également d’obtenir des résultats précis et de bonne qualité, avec une localisation plus précise de la fréquence de résonance. En guise de validation, le lecteur curieux peut effectuer un balayage standard avec la même résolution et vérifier que les résultats sont en parfaite corrélation.

Graphique comparant les paramètres S en fonction de la fréquence pour les simulations AWE et à balayage fréquentiel discret.
Graphique représentant les paramètres S issus des simulations Balayage en fréquence adaptatif (AWE) et Domaine fréquentiel discret. La résolution des résultats AWE est 50 fois plus fine.

La méthode fréquentielle sur base modale permet de capturer la résonance des circuits

Les réponses fréquentielles passe-bande d’un circuit passif résultent d’une combinaison de plusieurs résonances, et la méthode FDM est donc le meilleur choix pour accélérer leur modélisation. Elle comporte généralement deux étapes. L’analyse de fréquences propres est essentielle pour déterminer les fréquences de résonance d’un dispositif de forme arbitraire. Une fois toutes les informations nécessaires obtenues grâce à l’analyse de fréquences propres, il est possible de les réutiliser dans l’étude fréquentielle sur base modale. Cela permet d’optimiser l’efficacité de la simulation lorsqu’une résolution fréquentielle plus fine est nécessaire pour décrire plus précisément la réponse fréquentielle, comme illustré avec la méthode AWE.

Pour mener à bien une analyse FDM de manière cohérente, il convient de garder à l’esprit certains aspects. D’une part, il est nécessaire de filtrer tous les résidus non physiques indésirables à basse fréquence qui peuvent être présents dans la solution de Fréquence propre. D’autre part, il est nécessaire de prendre en compte tous les modes physiques susceptibles d’affecter les performances du dispositif dans la plage de fréquences cible afin d’obtenir des résultats corrects. Pour atteindre ces deux objectifs, il est nécessaire d’ajuster les paramètres de l’étude Fréquence propre (voir la capture d’écran ci-dessous). Tout d’abord, il est utile de sélectionner Partie réelle plus grande comme réglage de la Méthode de recherche autour du décalage. Ensuite, pour le réglage Rechercher les fréquences propres autour du décalage, la fréquence la plus basse de la bande passante sert de valeur approximative. Enfin, le paramètre Nombre souhaité de fréquences propres doit être ajusté (sur la base de tests préliminaires, par exemple) pour inclure le nombre nécessaire de modes.

L'interface utilisateur de COMSOL Multiphysics montrant le Constructeur de modèles avec l'étude Fréquence propre en évidence et la fenêtre de réglages correspondante avec ses sections Réglages de l'étude, Valeurs du point de linéarisation, et Sélection de la physique et des variables, développées.
L’étude en deux étapes Fréquentiel sur base modale est ajoutée au modèle. Ici, les réglages de l’étape Fréquence propre sont mis en évidence.

Pour nous essayer à l’analyse FDM, examinons le tutoriel Coupled Line Filter, disponible dans notre Bibliothèque d’applications. Initialement, le balayage fréquentiel de la simulation est effectué entre 3,00 GHz et 4,20 GHz avec un pas de 50 MHz au sein d’une étude classique Domaine fréquentiel.

Tutoriel de filtre à lignes couplées (à gauche) et ses résultats de balayage fréquentiel discret (à droite) avec une résolution de 50 MHz. Le graphique des paramètres S ne semble pas lisse sur la bande passante cible.

Ensuite, il est possible de recourir à l’étude Fréquentiel sur base modale, en configurant les réglages de chaque étape de l’étude de la manière décrite ci-dessus. Exécutons l’étude avec un pas fréquentiel 50 fois plus fin et vérifions l’amélioration des résultats. Tout comme avec la méthode AWE, le graphique des paramètres S issu de l’analyse FDM est plus lisse et plus instructif. Par exemple, il met en évidence toutes les ondulations du paramètre S11 qui manquaient initialement. En guise de validation, le lecteur curieux peut effectuer un balayage classique avec la même résolution et vérifier que les résultats sont en parfaite corrélation.

Il convient de noter que l’analyse de fréquence propre contient un port réduit qui a un impact sur la simulation en tant que facteur de chargement supplémentaire, si bien que la phase des paramètres S calculés est différente de celle du modèle de balayage fréquentiel classique. Les résultats ne sont compatibles qu’avec des valeurs de paramètres S indépendantes de la phase, telles que la valeur absolue, la réflectivité ou la transmittivité, exprimées en dB.

Graphique des paramètres S comparant un balayage fréquentiel classique et des simulations fréquentielles sur base modale.
Graphique représentant les paramètres S résultant des simulations Fréquentiel sur base modale (FDM) et des simulations Domaine fréquentiel discrètes. La résolution des résultats FDM est 50 fois plus fine.

Bien que cela ne soit pas directement lié au sujet original, vous noterez sur le dernier graphique la présence de Marqueurs de graphique spécifiques qui mettent en évidence tous les minima locaux du graphique du paramètre S11, ainsi que la bande passante pour le graphique du paramètre S21. En complément de l’extraction interactive des résultats à partir d’un graphique, qui est une autre amélioration récente des outils d’évaluation des résultats de COMSOL Multiphysics, cette fonctionnalité élève le caractère informatif et interactif des résultats à un niveau supérieur.

A propos de la gestion des données dans le cas d’une résolution fréquentielle fine

Comme mentionné précédemment, il n’y a pas de limites réelles à l’affinement d’un balayage fréquentiel avec les approches AWE ou FDM. Cependant, si la résolution est très fine, le résultat comportera une quantité considérable de données. Par conséquent, la taille du fichier du modèle sera considérablement plus importante lorsqu’il sera sauvegardé. Il est toutefois courant que lors de la conception de dispositifs RF et micro-ondes passifs, seuls les paramètres S soient intéressants. Dans ce cas, il n’est pas nécessaire de stocker toutes les solutions des champs. En choisissant l’option appropriée dans la section Conserver dans le modèle à l’issue du calcul d’une étape de calcul, il est possible de contrôler les parties du modèle sur lesquelles la solution calculée est sauvegardée. Par exemple, il est possible de n’ajouter que la ou les sélections contenant les frontières où sont calculés les paramètres S. Il s’agit des frontières auxquelles ont été affectés des Ports ou des Ports réduits, et elles sont généralement petites par rapport à l’ensemble du domaine de modélisation, ce qui permet de réduire considérablement la taille totale du fichier.

Notez qu’il est possible d’ajouter une telle sélection explicite lors de la configuration d’un port en cliquant sur l’icône Créer une sélection dans la section Sélection de frontières une fois que la sélection est spécifiée. Ensuite, il est possible d’ajouter les sélections explicites nécessaires, créées à partir des ports, dans la section Conserver dans le modèle à l’issue du calcul de l’étape de calcul concernée.

L'interface utilisateur de COMSOL Multiphysics présentant le Constructeur de modèles avec l'étape de calcul fréquentiel sur base modale sélectionnée, la fenêtre de réglages correspondante et une géométrie dans la fenêtre graphique.
La section Conserver dans le modèle à l’issue du calcul de l’étape de calcul Fréquentiel sur base modale dans laquelle ont été ajoutées deux sélections Port réduit. Il est possible de vérifier l’emplacement de ces sélections dans la fenêtre Graphiques.

Exemples de la Bibliothèque d’applications

Les méthodes de simulation présentées dans cet article de blog sont des outils puissants permettant une modélisation plus rapide et plus efficace des dispositifs RF et micro-ondes passifs. Les exemples suivants de la Bibliothèque d’applications peuvent fournir des indications supplémentaires sur la manière d’utiliser ces techniques :

Il est important de souligner que les méthodes et les études présentées ici sont universelles et qu’elles ne sont pas uniquement disponibles pour la modélisation RF. Par exemple, ces méthodes peuvent également être utilisées pour effectuer des calculs acoustiques, mécaniques, MEMS et d’optique ondulatoire.

Prochaine étape

Découvrez d’autres fonctionnalités spécifiques disponibles pour la modélisation RF et micro-ondes :


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